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  • Par Pascal Rieu

La peinture sur verre : mode d'emploi


La peinture sur verre, mode d'emploi (1ère partie)

La peinture sur verre est une des étapes majeure dans la confection d’un vitrail : c’est elle qui va donner la personnalité d’une création et renforcer l’identité d’un vitrail. Savoir maîtriser la technique et les subtilités des gestes demandent beaucoup de temps et de patience. Je vous décris dans cet article quelques-unes de mes techniques personnelles.

 

Peindre sur du verre avec des pigments (émaux, grisaille ou jaune d’argent) ce n’est pas comme peindre sur un support classique de type toile ou papier : en effet, le résultat final devra se voir et s’apprécier par transparence et non sur un support opaque. Quant aux modelés (rajout des ombres et des lumières), la logique est à l’exact opposée des techniques de dessin traditionnel. Nous allons détailler dans les paragraphes suivants ces techniques particulières.


Les grisailles et les émaux

1 - Les couleurs

Les émaux, les grisailles et les différents jaunes d’argent (cémentation) se présentent tous sous forme de poudre composée entre autres d’oxydes métalliques (pigments) et d’un fondant (potasse, oxyde de plomb...). Ces poudres, diluées dans de l’eau ou du vinaigre, sont appliquées sur le verre à l’aide de pinceaux puis cuites à différentes températures en fonction de la couleur et de la nature du pigment : 530° - 550° pour les émaux et les jaunes d’argent, 630° - 650 °pour la grisaille.


Ce qui fait vraiment la différence

Le vitrailliste choisit ses pigments en fonction de l’effet souhaité.

• Les émaux donneront après cuisson des couleurs translucides et transparentes sous forme d’une fine couche brillante et superficielle. L’application d'un émail renforce une couleur. Traditionnellement, les émaux sont appliqués sur le verso du verre (côté extérieur). Petit inconvénient cependant avec les émaux : une fois cuit, si l’on souhaite appliquer une nouvelle couche d’émail, la surface accroche bien moins la préparation, comme si elle était grasse.


Les grisailles donneront après cuisson des couleurs mates et opaques. Habituellement, le vitrailliste se sert de la grisaille pour définir les traits et les ombrés de la peinture, mais cette dernière peut également être utilisée pour renforcer et contraster une couleur (grisailles colorées). Les grisailles sont appliquées habituellement sur le recto du vitrail (côté intérieur). Au final, elles accrocheront bien plus la lumière que les émaux. Tout dépendra du rendu que vous souhaitez donner à votre peinture.


Les jaunes d’argent (couleur de cémentation) donneront après cuisson une gamme de jaunes transparents, qui vont du jaune clair jusqu’à une couleur ambrée. À la différence des émaux et des grisailles, les jaunes d’argent pénètrent le verre durant la cuisson. Il est important de noter également que le jaune d’argent est plus difficile d’utilisation car les rendus sont peu prévisibles : la couleur après cuisson peut ‘baver’ et s’étendre même si elle est bien appliquée. Lors du nettoyage de la pièce, certaines particules peuvent être invisibles avant la cuisson, mais visibles après sous formes de tâches jaunes claires. Enfin, les teintes et les densités de couleurs sont elles aussi difficilement prévisibles.

 

2 - La préparation

Avant de peindre, nous allons préparer les pigments. Pour cette opération, il est préférable de porter un masque hermétique ainsi que des gants (les poudres contiennent du plomb et peuvent pénétrer dans l’organisme par inhalation).


Les outils pour la préparation de la peinture

Les outils

Pour la préparation de la peinture, nous aurons besoin des outils suivants :

• une petite plaque de verre qui nous servira de support (1)

• une spatule (en acier pour les grisailles, en plastique pour les émaux (2)

• une seringue (sans aiguille!) ou un compte goutte (3)

• un véhicule, c’est-à-dire un liquide qui nous servira à diluer la poudre : eau, vinaigre ou huile de clou de girofle (4)

• un petit récipient (5)


Écrasement et dilution de la grisaille

Pour préparer sa couleur, déposer une petite quantité de poudre sur la plaque de verre, puis l’écraser sommairement en veillant à ne pas disperser les agglomérés de poudre. Déposer ensuite quelques gouttes de liquide sur la poudre écrasée et mélanger méticuleusement l’ensemble à l’aide de la spatule. Cette opération est importante, car plus les pigments seront finement broyés, plus la couleur après cuisson sera homogène et sans défaut. La texture idéale pour une application doit être lisse, sans grumeau, et moyennement fluide. Elle ne doit être ni pâteuse, ni trop liquide.

 

3 - La peinture

Les outils nécessaires pour peindre la grisaille

Les outils pour la peinture


pinceaux en poils de Martre pour les filets (1). Ils permettent de tracer les filets et les contours des dessins. Ils sont fins, se plient facilement et leur longueur permettent d’avoir une réserve suffisante de peinture pour tracer de longs traits.

• les blaireaux (2) : ces grandes brosses constituées de 3 rangées de poils de blaireau, permettent d’étaler et de répartir les pigments de manière homogène sur les pièces de verre (utilisation en biais), ou de donner une ‘matière’ aux aplats (utilisation verticale)

• les putois (3) permettent, comme les blaireaux, de donner une texture aux aplats

• les mouilleurs (4). Doux au toucher, en poil denses et coupés en pointe, ces pinceaux servent à étaler les pigments sur le verre

• les plumes métalliques de calligraphie(5) servent à dessiner avec précision : les traits sont fins, le débit est constant mais attention à ne pas trop charger votre plume. Si en tenant votre plume à la verticale, une goutte se forme rapidement, c’est qu'il y a trop de peinture

• un petit banc en bois (optionnel) qui servira d’appui à la main (6).

Avant de commencer à peindre, il faut veiller à ce que chaque pièce de verre soit bien propre : toutes les traces de doigts ou ou autres seront visibles après cuisson. or une fois que la peinture est appliquée, il vous sera plus difficile de nettoyer la pièce avant de l’enfourner. L’opération de nettoyage avant la peinture est donc essentielle si l’on veut avoir une pièce bien propre. À l’aide d’un chiffon doux et d’un produit pour vitres ou d’un vinaigre d’alcool, bien nettoyer la pièce de verre.


Traçage d'une ligne au pinceau

Tracer des lignes

Prendre un pinceau de Martre (n°4 et 6 pour les traits fins, 8 et 10 pour des traits moyens ou épais). de la quantité de grisaille dépendra la longueur du trait : plus il y a de liquide dans les poils, plus le trait sera long. Veillez également à ce que la peinture soit correctement diluée. Si lorsque vous passez le pinceau, la grisaille a du mal à se fixer à la surface, ou si le trait est en relief, c’est que vos pigments ne sont pas assez dilués. Inversement, si le trait est de couleur claire et est légèrement transparent, c’est que la grisaille est trop diluée. Vous pouvez vous aidez du petit banc de bois, ou tracer directement à main levée. Maintenez votre pinceau verticalement, le poignet souple, et tracez votre trait avec une pression du pinceau constante, sans trop appuyer. Pour les courbes, le geste étant plus difficile, exercez-vous au préalable sur une plaque de verre avant de commencer à travailler sur votre morceau final. Mettez suffisamment de peinture pour ne pas à revenir plusieurs fois sur votre trait : l’idéal est de faire un enroulé en une seule fois. Si vous n’y parvenez pas, faites-le en plusieurs fois. Vous pourrez toujours corriger vos filets en effectuants des enlèvements à l’aide d’un cure-dent ou d’une lame métallique.


Dessin à la plume et à la grisaille

Peindre un aplat

Pour les aplats et les modelés, la grisaille doit être assez liquide. À l’aide d’un pinceau mouilleur, répartir les pigments uniformément sur la surface souhaitée.

Répartition de la grisaille au pinceau

Blaireauter immédiatement de façon à bien répartir la peinture : le geste doit être léger et le blaireau doit effleurer la surface mouillée. Effectuez des passages croisés, de haut en bas et de gauche à droite. Effectuez ces gestes en veillant à ce que votre verre soit toujours humide. Si votre peinture commence à sécher et s’il n’y a plus assez d’eau, vous risquez d’enlever les particules à chaque coup de pinceau.


Blaireautage de la grisaille

N’hésitez pas à tout enlever et recommencer si le résultat n’est pas satisfaisant (aplat uniforme et sans zones claires ou sombres). Vous avez également la possibilité de donner du grain à votre aplat, en tapotant légère- ment votre aplat encore humide à l’aide d’un putois. Vous pouvez également putoiser sur un fond sec, mais attention, les grains seront plus fins... et plus nets!

Peindre un modelé (dégradés, zones claires et zones sombres

Le modelé au blaireau

Pour les aplats et les modelés, la grisaille doit être assez liquide et assez claire. une des erreurs fréquentes que l’on commet lorsqu’on est novice en peinture sur verre, c’est de faire des tons trop foncés ou des contrastes trop importants. Après une première cuisson, les pigments fixés sur le verre vont avoir tendance à accrocher les pigments de la nouvelle couche de peinture. Pour éviter ce problème, il est donc conseillé de faire un jus clair sur toute la surface de la pièce à peindre. De cette façon non seulement cela enlèvera de la transparence à votre verre, mais cela vous permettra également de travailler les ombres avec plus de facilité. Pour réaliser un modelage, appliquer la couleur avec un pinceau mouilleur. Veillez à ce que votre pièce de verre soit suffisamment humide pour éviter le désèchement de la peinture. À l’aide d’un blaireau, répartissez vos pigments de façon à distribuer les zones claires et les zones sombres de votre modèle.


Blaireautage de la grisaille à la verticale

Enfin, si vous souhaitez donner un grain à votre modelé, tapoter la peinture encore humide à l’aide de votre putois. Après la première cuisson, les valeurs vous paraitront plus claires que ce qu’elles étaient avant d’enfourner votre pièce, surtout si vous avez peint avec un jus relativement clair. Cela est tout à fait normal puisque lors de la cuis- son, les pigments vont s’étaler et fondre, et une partie de ces pigments va partir lors du nettoyage de la pièce.

 

4 - Les enlevés

Les outils pour les enlevés :

• les blaireaux et putois (1)

• les gommes (2). Ce sont des crayons possédant un embout en caoutchouc plus ou moins rigide et de forme différentes : plats, en biseau, pointus...

• cure-dents et porte brochettes (3) : en bois, ils permettent des enlèvements fins et réguliers

• les pointes métalliques (4) : X-Acto, bistouri, aiguilles... ces petites lames en métal permettent un travail très méticuleux et d’une précision extrême

• cotons tiges : ils servent à enlever de grandes surfaces et à nettoyer le verre de manière précise



Les enlevés avec un putois ou un blaireau

Avant de commencer les enlèvements, il faut que votre peinture soit totalement sèche. Tamponner doucement la surface puis souffler régulièrement de façon à évacuer les pigments. Faites en sorte de changer à chaque passage la position du pinceau de façon à avoir des dégradés réguliers et éviter ainsi les empreintes parallèles.

Un enlevé au putois, position verticale

Avec un peu de pratique, vous remarquerez que chaque brosse ou pinceau laisse un grain différent, plus ou moins dense, plus ou moins fin.


Un enlevé au blaireau par effleurement horizontal

Une autre technique consiste à balayer la peinture par un léger effleurement de la surface. Le résultat est différent car il laisse non pas des points mais des rayures. Cette technique est moins précise et demande une certaine dextérité.


Les enlevés à la gomme ou au bois

Un enlevé à la gomme
Enlevé au bois

Les gommes et les petits bois (cures-dents, portes brochettes...) sont utilisés pour des enlèvements clairs et précis. Le passage de ces outils sur la peinture laisse des zones parfaitement claires et exemptes de toutes





Enlevé au pinceau fin

Enlevés avec les pointes métalliques

L’utilisation des lames métalliques (X-Acto, bistouri...) vont vous permettre de procéder à des enlèvements d’une précision optimale. Chaque passage de la lame va enlever une infime partie de peinture. Le trait laissé est si fin que l’on va procéder par une multitude de rayures : parallèles, croisées, en ronds. Le travail à la pointe métallique est extrêmement méticuleux et parfaitement adapté pour les petites zones à éclaircir.

Enlevé à la lame

Enfin, pour tous ceux qui souhaite s'initier aux techniques de la peinture sur verre, je propose un atelier d'initiation sur 20 heures. Pour voir le contenu de cet atelier, aller sur la page 'Formations' de ce site


Résultat final de la peinture

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